The Spellcasters trois guitaristes rendent hommage à la Telecaster

L’aventure du groupe The Spellcasters (Les lanceurs de sorts) a commencé dans le légendaire roadhouse JV’s de Virginie du Nord. Les guitaristes originaires de Washington, Anthony Pirog et Joel Harrison, âmes sœurs de la musique et qui ont commis leur premier concert ensemble, se sont lancés dans un set de chansons honkytonk (musique de bastringue) aux accents jazz devant une foule stupéfaite. Mais deux Telecaster ne suffisaient pas. Le bassiste du concert, John Previti, qui a accompagné la légende de la guitare Danny Gatton pendant vingt ans, avait invité le célèbre guitariste local, Dave Chappell, à se joindre à eux. Rapidement, trois Telecasters s’affrontent, explorant une histoire commune et de nouvelles frontières. The Spellcasters étaient nés.

Music of the Anacostia - The Spellcasters - Mazik

The Spellcasters en bref

La formation se spécialise dans la musique faite par et pour cette unique et merveilleuse invention américaine, la guitare Fender Telecaster. Deux maîtres de la « Telly » qui ont particulièrement inspiré le groupe sont les légendes de Washington DC, Danny Gatton et Roy Buchanan. Cependant, tout en célébrant ces mentors, The Spellcasters ont cherché leur propre identité, qui est un carrefour de styles à cheval sur la ligne Mason-Dixon, où le jazz, le rockabilly, le R&B, la country et le rock ‘n’ roll ne font qu’un.

Il ne s’agit pas tant d’un groupe de solistes que d’un ensemble de guitares qui explore l’identité musicale du Delta d’Anacostia, qui englobe Washington DC, le sud du Maryland et le nord de la Virginie.

Anthony Pirog est le plus jeune membre de la tribu, un expérimentateur avoué, mais aussi une vieille âme qui connaît bien la tradition. Il fait partie du célèbre duo Janel and Anthony ainsi que de The Messthetics. Il est difficile de penser à la grande scène expérimentale de Washington sans penser immédiatement à lui !

Dave Chappell a joué avec d’innombrables musiciens de Washington DC et dirige son propre groupe Take-no-Prisoners qui rocke et swingue dans toute la région. Il a pris des cours avec Gatton au début des années 80 et a joué avec lui par la suite.

Joel Harrison est un aventurier intrépide basé à Brooklyn, qui a à son actif 20 CD de musique originale et de reprises fracassantes. Pour lui, les Spellcasters c’est un retour aux sources.

Le bassiste John Previti et le batteur Barry Hart ont côtoyé une grande partie de la fine fleur musicale de Washington DC depuis les années 1970. Previti a été le bassiste de Gatton pendant 20 ans et ensemble, ils ont accompagné Evan Johns, Rick Whitehead, The Nighthawks et ont tourné ensemble dans le propre groupe de Danny, Fun House, à la fin des années 1980. Leurs compétences ont été aiguisées par des milliers de concerts, de la Maison Blanche à la gargote local.

The Spellcasters c’est avant tout un groupe de scène et ils ont construit leur alchimie au cours de deux années de concerts dans la région de Washington. Dans cet esprit, six des onze chansons du CD ont été enregistrées en concert. L’album transpose une atmosphère sympa et décontractée, mais il est aussi plein d’arrangements bien pensés, comme la voix intime de Joel Harrison sur Bright Mississippi de Monk, la finesse de jeu sur That Was Then de Bill Frisell, ou les accords swings de Jax Boogie de Chappell.

Music from the Anacostia Delta est une lettre d’amour à la Telecaster, et à ses plus grands représentants comme Jimmy Bryant, Roy Nichols, Jerry Donahue, Roy Buchanan, Danny Gatton, Jeff Beck, Bill Frisell et tant d’autres.

Le premier album Music of the Anacostia Delta du quintet paru en mai 2019 est entièrement instrumental. Il est influencé par la musique hybride du delta d’Anacostia et rend hommage aux guitaristes locaux de cette région, en particulier Danny Gatton (décédé en 1994) et dans une moindre mesure à Roy Buchanan (décédé en 1988). Gatton et Buchanan étaient tous deux des maîtres de la Telecaster qui ont fusionné le blues, le rockabilly, le jazz et la country dans des morceaux mémorables.

La genèse de ce projet s’est produite lorsque Pirog et Harrison ont donné un concert dans un roadhouse de Washington et que Chappell a été invité à y assister. Avec trois Telecasters partageant la scène, The Spellcasters étaient formés. Le résultat de ce sommet de la guitare est l’un des meilleurs albums instrumentaux dans ce style.

Les Spellcasters sont devenus un très bon groupe de scène, c’est pourquoi six des onze morceaux de Music of the Anacostia Delta ont été enregistrés au Rhizome, un espace artistique communautaire situé dans le quartier de Takoma à Washington. La liste des titres du CD est un assortiment d’originaux (un de Chappell, un de Pirog, deux de Harrison), deux reprises de Gatton, d’autres associées à Gatton et/ou Buchanan, et de la musique qui correspond au style, à l’humeur ou au cadre géographique du disque.

La présence de trois guitaristes talentueux met l’accent sur la camaraderie, le son de la Telecaster et les accents sonores. Cette facette peut être entendue sur l’ouverture, une version live de la chanson « Sky King » écrite par Gatton, où les trois guitaristes brillent tandis que la basse et la batterie fournissent une base rythmique lente.

Ensuite, les choses s’accélèrent sur « Jax Boogie » de Chappell, un morceau aux accents rockabilly, qui comporte également quelques attributs jazz et constitue un clin d’œil à l’époque de la fin des années 50, où les instrumentaux se retrouvaient souvent au top 40.

« Jax Boogie » vous fera taper du pied et l’exécution rapide par le groupe de « Rock Candy » de Jack McDuff était appelé par Gatton de « redneck jazz ». The Spellcasters ne lésinent pas sur les éléments de jazz mais renforcent les interactions teintées de musique rock pour donner à « Rock Candy » une nouvelle tournure.

Le groupe ralentit et vise le territoire du rock ainsi qu’un sens de la poésie sur une reprise live de « Kindred Spirits » de Gatton, où les trois guitares s’entremêlent.

Un côté encore plus tendre embrasse l’interprétation expressive en direct par les Spellcasters du standard de jazz « Harlem Nocturne ».

Certaines musiques ne sont pas nécessairement liées à Buchanan ou à Gatton mais correspondent au thème général. La sublime interprétation en live par les Spellcasters de « That Was Then » de Bill Frisell (extrait de l’album Good Dog, Happy Man, sorti en 1999) s’inscrit dans l’ambiance générale, tant sur le plan musical que géographique (Frisell est né à Baltimore est un guitariste « Fender Telecaster » réputé). Ici, les guitares sonnent plutôt style Americana.

Le morceau de jazz, « Bright Mississippi » de Thelonious Monk suscite une réaction positive du public.

La chanson « Running After » de Pirog et les deux compositions de Harrison sont également remarquables. High Mountain » de Harrison – une magnifique pièce jouée uniquement à la guitare – est d’une esthétique merveilleuse qui témoigne de l’approche innée et collaborative des trois guitaristes. Hudson Unlimited » de Harrison est un morceau mid-tempo d’une sincérité toute américaine qui met l’accent l’art du contrepoint.

The Spellcasters concluent avec une reprise émouvante de « Sweet Dreams » de Don Gibson, l’un des morceaux phares de Buchanan.

Cet hommage à la Telecaster par trois guitaristes est assez rare donc Music of the Anacostia Delta et un véritable ovni à ne pas louper si vous le trouvez.

Trackliste de Music From The Anacostia Delta

1.Sky King 04:56
2.Jax Boogie 03:25
3.That Was Then 05:24
4.Rock Candy 03:12
5.Running After 04:43
6.High Mountain 05:45
7.Kindred Spirits 04:31
8.Harlem Nocturne 04:35
9.Hudson Unlimited 04:51
10.Bright Mississippi 03:29
11.Sweet Dreams 04:14

Lineup

Joel Harrison : guitares
Anthony Pirog : guitares
Dave Chappell : guitares
John Previte : basse électrique et acoustique
Barry Hart : batterie

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