1998 : Hubert Felix Thiefaine > Exercice de simple provocation…

1998 : Hubert Felix Thiefaine Le bonheur de la tentationHey « Thiefaine » mais ou as-tu cherché un titre pareil ? « Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable », je sens que tu as eu « Le bonheur de la tentation » de nous narguer.

Ce pamphlet laconique et contestataire concerne tout à chacun, mais sans langue de bois aucune avec ce « J’me sens coupable »…

Ambiance pop/rock avec chœurs irrésistibles, guitares en pagaille, arrangements de cordes à faire chialer, et paroles dévastatrices. HFT règle ses comptes en 33 coupables et si le passage sur le sexe est hilarant, celui sur l’occupation et les dénonciations anonymes met mal à l’aise. C’est pour cela que cet exercice de provocation touche au sublime en bien des aspects. Cette chanson est un gémissement ombrageux du cœur sur un rythme lent, au texte parlé, égrainé comme on raconte une histoire malsaine.

Avec cette réponse au diptyque « La tentation du bonheur », Hubert Felix se dévoile tout de noir vêtu, angoissé, inquiet, en proie à ses démons. On trouve nombre de perles dans ce disque magistral, avec :

– Le violoncelle lancinant de « Empreintes sur négatif » et sur lequel la voix d’HFT vogue au gré de la mélodie avant que la guitare prenne le relais.
– La comptine folk de « La ballade d’Abdallah Geronimo Cohen » qui nous laisse flâner dans les grands espaces américains.
– Les riffs déchirants de « Eurydice nonante sept ».
– Le solo de guitare soutenu par la rythmique d’acier avec « Dans quel état terre ».
– Le slow métallisé de « Bouton de rose ».
– Le long blues rock délirant, bavard mais irrésistible, de « 27ème heure, suite faunesque », un des meilleurs morceaux de l’album.
– Le rock sudiste de « retour vers la lune noire ».
– Et pour terminer la « Méthode de dissection du pigeon à zone-la-ville » sur laquelle plane Bashung.

Voilà donc un album rare, superbe, magnifique, brillant avec un bon gros son rock (merci Patrice Marzin), illustré par une cascade de mots magnifiques dans un écrin de poèmes.

Ignoré en concert, faites-vous plaisir, regardez ce live lors du Bercy 98.

Paroles de « Exercice de simple provocation avec 33 fois le mot coupable » tiré de « Le bonheur de la tentation » de « Hubert Felix Thiefaine ».

Coupable. Cououououpable !
Je me sens coupable d’avoir assassiné mon double dans le ventre de ma mère et de l’avoir mangé.
Je me sens coupable d’avoir attenté à mon entité vitale en ayant tenté de me pendre avec mon cordon ombilical.
Je me sens coupable d’avoir offensé et souillé la lumière du jour en essayant de me débarrasser du liquide amniotique qui recouvrait mes yeux la première fois où j’ai voulu voir où j’en étais.
Je me sens coupable d’avoir méprisé tous ces petits barbares débiles insensibles, insipides et minables qui couraient en culotte courte derrière un ballon dans les cours de récréation et je me sens coupable d’avoir continué à les mépriser beaucoup plus tard encore alors qu’ils étaient déjà devenus des banquiers, des juges, des dealers, des épiciers, des fonctionnaires, des proxénètes, des évêques ou des chimpanzés névropathes
Je me sens coupable des lambeaux de leur âme déchirée par la honte et par les ricanements cyniques et confus de mes cellules nerveuses
Je me sens coupable. Cououououpable !
Je me sens coupable d’avoir été dans une vie antérieure l’une de ces charmantes petites créatures que l’on rencontre au fond des bouteilles de mescal et d’en ressentir à tout jamais un sentiment mélancolique de paradis perdu…
Je me sens coupable d’être tombé d’un tabouret de bar dans un palace pour vieilles dames déguisées en rockstar, après avoir éclusé sept bouteilles de Dom Pé 76, dans le seul but d’obtenir des notes de frais à déduire de mes impôts…
Je me sens coupable d’avoir arrêté de picoler, alors qu’il y a des milliers d’envapés qui continuent chaque année, à souffrir d’une cirrhose ou d’un cancer du foie ou des conséquences d’accidents provoqués par l’alcool …
De même que je me sens coupable d’avoir arrêté de fumer alors qu’il y a des milliers d’embrumés qui continuent chaque année, à souffrir pour les mêmes raisons à décalquer sur les poumons en suivant les pointillés …
Et je me sens aussi coupable d’être tombé de cénobite en anachorète et d’avoir arrêté de partouzer, alors qu’il y a des milliers d’obsédés qui continuent chaque année, à souffrir d’un claquage de la bite, d’un durillon du clitoris, d’un anthrax max aux roubignolles, d’une overdose de chagatte folle, d’un lent pourrissement scrofuleux du scrotum et du gland, de gono, de blenno, de tréponem, de chancres mous, d’HIV… ou de salpingite….
Je me sens coupable. Cououououpable !
Je me sens coupable d’être né français, de parent français, d’arrière arrière etc… grands parents français, dans un pays où les indigènes pendant l’occupation allemande, écrivirent un si grand nombre de lettres de dénonciation, que les nazis les plus compétents et les mieux expérimentés en matière de cruauté & de crimes contre l’humanité, en furent stupéfaits et même un peu jaloux…
Je me sens coupable de pouvoir affirmer qu’aujourd’hui, ce genre de pratique de délation typiquement française est toujours en usage et je prends à témoin certains policiers compatissants, certains douaniers écoeurés, certains fonctionnaires de certaines administrations particulièrement troublés et choqués par ce genre de pratique.
Je me sens coupable d’imaginer la tête laborieuse de certains de mes voisins, de certains de mes proches, de certaines de mes connaissances, de certains petits vieillards crapuleux, baveux, bavards envieux et dérisoires, appliqués à écrire consciencieusement ce genre de chef d’œuvre de l’anonymat…
Je me sens coupable d’avoir une gueule à être dénoncé…
Je me sens coupable. Cououououpable !
Je me sens coupable de garder mes lunettes noires de vagabond solitaire, alors que la majorité de mes très chers compatriotes ont choisi de remettre leurs vieilles lunettes roses à travers lesquelles on peut voir les pitreries masturbatoires de la sociale en train de chanter c’est la turlute finale….
Je me sens coupable de remettre de jour en jour l’idée de me retirer chez mes Nibelungen intimes et privés, dans la partie la plus sombre de mon inconscient, afin de m’y repaître de ma haine contre la race humaine et même contre certaines espèces animales particulièrement sordides serviles et domestiques que sont les chiens, les chats, les chevaux, les chèvres, les tamagoshis et les poissons rouges…….
Je me sens coupable de ne pas être mort le 30 septembre 1955, un peu après 17 h 40, au volant du Spider Porsche 550 qui percuta le coupé Ford de Monsieur Donald Turnupseed.
Je me sens coupable d’avoir commencé d’arrêter de respirer, alors qu’il y a quelques six milliards de joyeux fêtards crapoteux qui continuent de se battre entre eux, et de s’accrocher à leur triste petite part de néant cafardeux.
Je me sens coupable. Cououououpable !
Je me sens coupable. Cououououpable !
Cououououpable !
Cououououpable !

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